Interview de Alec Bates, partenaire sud-africain des Villas Valriche

publié le

De passage à Maurice, Alec Bates, partenaire de Villas Valriche, nous parle du principe des projets IRS. Il porte un éclairage sur ce que recherchent les Sud-Africains qui viennent s’installer ici et nous donne son opinion personnel sur le problème des Sud-Africains à Maurice.

Vous êtes le partenaire sud-africain des promoteurs mauriciens de l’« Integrated Resort Scheme » (IRS) Villas Valriche. La situation n’est pas très rose actuellement…

Vendre des villas IRS aux étrangers c’est leur donner un moyen d’investir dans un pays. Le scénario idéal est de donner la possibilité à une personne d’acheter un morceau d’une île tropicale.

A des gens riches ?
Pas nécessairement extrêmement riches. Disons des gens « confortables », ceux qui ont un peu d’argent, ceux qui peuvent se permettre d’avoir une deuxième, troisième ou même quatrième maison.
_ Comparés aux habitants de ces îles justement, ces acheteurs sont riches !
Il y a aussi des gens riches ici. Ils peuvent aussi s’acheter des IRS, mais cela leur reviendrait à très cher à cause de la taxe.

Oui, mais les IRS ne se font pas dans des pays développés, non ?
Cela se passe principalement dans des pays en développement. C’est une façon de permettre aux étrangers d’acheter de la terre mais, en même temps, restreindre ce droit à une petite superficie. Ce genre d’activité a eu beaucoup de succès dans des pays méditerranéens comme la Grèce etc.

Ce que le secteur de l’IRS a de particulier, c’est que ce n’est pas un produit de base : une personne ne doit pas absolument acheter une villa à l’étranger, il l’achète si cela lui fait plaisir. Pour l’acheteur, c’est une façon de placer son argent et de diversifier ses risques. Mais, c’est aussi un achat que l’on fait avec émotion. Et, je pense que le secteur des villas de luxe, de par le monde, a très bien marché.

Est-on arrivé à un point où les choses ne vont plus très bien, à cause, justement, de la crise économique ?
Ce problème est lié au climat économique, ce n’est pas un problème de IRS. Les ventes ont commencé à baisser en 2008 et en 2009, les choses n’étaient pas bonnes du tout – nous avions vendu seulement 12 villas. Mais, les choses ont repris en 2010, nous avons vendu 20 villas et nous ne sommes qu’en juin, donc vous voyez que les choses reprennent.

La compétition internationale dans le marché de l’IRS, à travers le monde, vous inquiète-t-elle ?
Le monde est vaste, mais ce qu’il y a d’unique avec Maurice, c’est que tout acheteur qui a acheté ou veut acheter une villa, connaît déjà l’île pour y être venu passer des vacances. Les Seychelles ont aussi des villas, excepté que la situation économique là-bas est différente.

Il y en a aussi aux Caraïbes et dans la Méditerranée. La demande sera toujours là et la bonne nouvelle, c’est qu’il y a un nombre limité de propriétés en vente à Maurice. Il y a normalement 300 à 400 villas en vente, ce qui n’est rien du tout.

_ La plupart des acheteurs sont Sud-Africains ?
Nous ciblons ce marché-là parce que nous avons un bon réseau là-bas. L’idée de vivre à Maurice est très attrayante pour les Sud- Africains.
_ Pourquoi ? Nous avons l’impression, ici, que les Sud-Africains sont en train de fuir leur pays...
Disons que nous leur vendons une politique d’assurance. L’Afrique est l’Afrique et l’Europe est l’Europe. Il s’agit de répartir les risques : si vous êtes une personne riche et que vous vivez en Afrique du Sud, cela a du sens d’investir ailleurs. Les avantages d’être un résident de Maurice sont assez conséquents : vous n’avez pas à vous inquiéter de pouvoir aller et venir comme bon vous semble si vous avez un permis de résidence. C’est un bon investissement et Maurice ne se trouve qu’à quatre heures de l’Afrique du Sud. Ceux qui achètent des IRS ne vivent pas normalement à plein temps à Maurice.
_Pas ceux-là mais, il y a actuellement une situation un peu délicate avec des Sud- Africains – qui, je le précise, ne sont pas vos clients – qui est en train de causer des problèmes sociaux...
Nos acheteurs sont des acheteurs haut de gamme qui sont normalement des hommes ou femmes d’affaires, qui dirigent leurs entreprises d’ici et qui paient des taxes ici. Donc, je ne peux vraiment pas commenter sur les problèmes que vous rencontrez avec les Sud-Africains.

D’ailleurs, des 120 villas que nous avons vendues, il y a 40 % d’acheteurs qui sont Sud- Africains et il y en a de tout : des Sud-Africains noirs, des Sud-Africains blancs, des Afrikaans et ceux qui parlent Anglais. Le reste vient de France, de la Grande-Bretagne. Il y a quelqu’un qui vient d’Angola, certains viennent de l’Inde, de la République tchèque, du Moyen-Orient etc.
_ Vous êtes conscient qu’il y a des problèmes avec des Sud-Africains ?
Tout à fait, j’entends des choses.

Les Sud-Africains ont-ils des difficultés à s’intégrer généralement ?
Peut-être que les problèmes viennent des Mauriciens et pas des Sud-Africains ! Peut-être que les Mauriciens ont un certain ressentiment envers les Sud-Africains parce que ces derniers ont plus d’argent qu’eux et ont leur propre façon de s’amuser.

Ou parce que les Sud-Africains ne font aucun effort d’intégration ?

Les Sud-Africains que nous avons employés aux Villas Valriche ont des familles et je pense qu’ils se mélangent aux autres puisque leurs enfants vont à l’école. Ils rencontrent les autres quand ils jouent au golf ou s’adonnent à d’autres activités sportifs ou des book clubs etc.

Pourquoi les Villas Valriche emploient-elles des Sud-Africains pour travailler ici ?

Nous avons des Sud-Africains qui sont spécialisés dans certains métiers comme la vente. Nous avons aussi une directrice des ventes qui est Mauricienne qui est mariée à un Sud-Africain. Elle parle français et anglais. En fait, nous avons aussi employé des Mauriciens qui travaillaient à l’étranger et qui sont revenus à Maurice pour travailler pour nous.

La population locale est-elle un facteur que vous, en tant qu’entrepreneurs, vous prenez en considération ?
Je ne serai jamais venu à Maurice si je n’avais pas eu comme partenaire le groupe Rogers. Il faut avoir des partenaires locaux si vous voulez faire du business ici. Donc, cela devient un mariage de raison. Il y a plusieurs autres industries qui ont été créées grâce à ce projet.

Cela ne vous dérange pas de vendre du luxe aux gens alors qu’on est entouré de pauvreté ?
Tout est relatif ! Je vis à Johannesburg et la pauvreté là-bas est dix fois pire que celle à Maurice. Je pense que les gens à Maurice ont, en général, une qualité de vie assez élevée. Quelques-uns n’ont peut-être pas beaucoup d’argent mais c’est pareil partout dans le monde ! (...) Est-ce que cela me dérange de vendre le luxe ? Pas du tout parce que cela crée des métiers pour les gens.

Et les « gated communitie » ne créent pas de ressentiment, vous pensez ?

C’est une façon de vivre. La sécurité es très importante.
_ Pour empêcher que les autres moins fortunés ne s’approchent de trop près ?
Surtout pour protéger ceux qui ont acheté les propriétés. La beauté avec ces morcellements, c’est que vos enfants et votre épouse sont en sécurité. Il n’y en a pas beaucoup à Maurice, de toutes les façons, comparés au reste du monde.

L’express du samedi 19 juin 2010